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15 janvier 2015

Cultiver son empathie

com internationalContexte : Cette histoire nous a été racontée par notre intervenant extérieur en Marketing et Communication à l'ESSEC, par ailleurs consultant interne international pour une multinationale suisse de l'agro alimentaire. La mission qu'il avait choisie pour illustrer son intervention était la suivante : Enquêter sur la baisse inquiétante des ventes dans le secteur « Indonésie » depuis que la filiale avait été remplacée par un agent commercial sous contrat, soit trois ans. Proposer des solutions et suivre l'évolution des ventes.

Déroulement de l'affaire et suivi : A peine arrivé à Jakarta, le premier rendez vous de mon « prof » fut bien évidemment pour l'agent commercial, caricature de l'anglais « colonial » : rouquin à moustaches, son teint indiquait clairement qu'il ne buvait pas que du thé et il devait transpirer abondamment en l'absence de clim ; bref, il ne lui manquait que le casque de soldat de l'armée des Indes pour compléter le tableau. Cet agent commercial « de choc » fit d'abord une présentation valorisante de son activité et de ses résultats dans les grandes villes où, cultivant son réseau, il augmentait l'implantation de la firme dans les GMS et hypers (la grande distrib était naissante en Indonésie). Par contre, pour la distribution dans « la jungle » et les villes de moindre importance, il avait remplacé le réseau de correspondants de la firme, qu'il déclarait ne pouvoir suivre faute de temps, par un autre agent commercial, sous contrat avec lui et que là, il ne maîtrisait rien, que la chute des ventes globales était imputable à cette activité et qu'il songeait d'ailleurs à virer ce correspondant. Avant de passer à cette étape mon « prof » proposa de le rencontrer pour une explication franche et claire. « Vous verrez, c'est un petit chinois qui ne parle qu'en pidgin et qui doit organiser le distribution des produits avec une armada de porteurs, de gens en vélo ou autres moyens de transports divers et variés »

Le jour du rendez vous mon « prof » accueillait « le petit chinois » (costume de bonne coupe, look de jeune cadre dynamique, visage impénétrable) par un salut traditionnel, mains jointes et tête inclinée, avec des mots de bienvenue en mandarin de bon aloi. Un bref sourire apparut sur le visage de l'honorable correspondant, puis l'entretien en pidgin avec l'anglais (qui ne s'était pas donné la peine de saluer leur visiteur) se déroula avec une traduction qui devait être approximative. Affichant un mépris caractérisé pour leur visiteur, l'anglais conduisait plus une enquête de police qu'une séance de « brain storming » et mon prof essayait de modérer ses ardeurs avec des regards navrés pour le « petit chinois » qui restait imperturbable et ne s'exprimait que par des phrases très courtes , à la limite de l'onomatopée. L'entretien n'indiquait donc aucune piste d'amélioration et mon prof pensait que la solution préconisée par l'anglais était la seule envisageable : il fallait changer d'agent commercial pour la campagne.

Alors qu'il ruminait ses pensées, en se promenant dans les rues à la recherche d'un restaurant, il tombait, au coin d'une rue et par une heureux hasard (pas si hasard que cela d'ailleurs) sur leur honorable correspondant qui d'emblée, dans un anglais qu'il avait du cultiver à Oxford ou Cambridge, lui déclarait :

- « Rassurez vous, les ventes dans mon secteur cela va repartir, il suffit de négocier les objectifs »

- « Je vous en remercie, mais dites moi : pourquoi ? »

- « Parce que depuis trois ans, vous êtes le seul qui se soit montré poli avec moi ».

Et c'est autour d'un bol de soupe, dans un de ces restaurants de rue typiques des villes asiatiques, qu'ils conclurent leur accord. Le « petit chinois » avait effectivement fréquenté Cambridge et fait des études de très bon niveau en commerce international. La suite préconisée par mon prof fut appliquée par la firme :

  • Éjection avec indemnités limitées de l'agent co anglais (co comme colonial plutôt que commercial!)
  • Création d'une « joint venture » à 50/50 avec l'honorable correspondant chinois.
  • Embauche à prix d'or d'une équipe de cadres commerciaux européens, parlant chinois, prêts à l'aventure.
  • Mise en œuvre du projet sous la gouvernance de mon prof.

L'Indonésie allait ainsi se révéler un des territoires les plus profitables de la firme.

Conclusion

Il suffit parfois de pas grand chose pour faire des affaires ; mon prof n' avait que développé son empathie à l'égard de son interlocuteur. Respecter l'autre,s'adapter à lui, c'est la première étape de l'écoute client. Mais attention, l'empathie, ce n’est en aucun cas une technique de com', c'est une vraie compétence, développée à partir de la CAM du commercial (connaissances, aptitudes et motivations).

La technique sans génie n'est rien qu'une sale manie, le génie sans technique n'est rien qu'une sale maladie.

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